Faut-il encore le prouver : Wallonie-Bruxelles dispose d’un fort potentiel dans l’aérospatial. Les Emirats arabes unis, de leur côté, ambitionnent de devenir un hub régional en la matière depuis le lancement de leur 1ère sonde vers Mars.
Il est logique, dès lors, de proposer une masterclass présentant l’excellence de Wallonie-Bruxelles dans ce domaine lors de la Semaine Wallonie-Bruxelles à l’Exposition universelle de DubaÏ. La plateforme conjointe WBI-AWEX en Recherche & Innovation a confié cette mission à deux scientifiques de la Fédération Wallonie-Bruxelles : Sarah Baatout et Vladimir Pletser. Les deux experts mèneront un dialogue inspirant et dynamique sur l’exploration spatiale en Wallonie.
En effet, après la Lune, Mars est la prochaine étape dans la conquête de l’espace. Planète voisine de la Terre, Mars est à quelques centaines de millions de km seulement, et il ne faut que quelques mois pour l'atteindre. Mais les radiations cosmiques, l'exposition à long terme à la microgravité, les problèmes psychologiques, les contaminations potentielles, sont autant d'éventuels obstacles. Il y a encore tant de choses à étudier, à découvrir et à organiser avant qu'un équipage humain puisse faire ce voyage.
La recherche scientifique et technique, le savoir-faire et l'expertise de la Wallonie et de Bruxelles sont reconnus dans le monde, comme le montre la masterclass concoctée par Sarah Baatout et Vladimir Pletser, divisée en plusieurs chapitres consacrés chacun à un projet scientifique et intitulée "L'excellence belge en matière de sciences et d'arts spatiaux".
Chaque présentation de projet est suivie d’une capsule artistique sur le thème de l’espace. En effet, Sarah Baatout participe au projet européen "Curious" qui consiste à mettre en relation des chercheurs et des artistes : les performances de cinq artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont filmées dans les décors de l’Euro Space Center (le peintre Olivier Lamboray, l’artiste culinaire Isabelle Arpin, le pianiste Daniel Vivès-Lynch, le baryton Daniel Van Quickelberghe et le dessinateur bédéiste et scénariste Pierre-Emmanuel Paulis).
L’après-midi de cette journée placée sous le signe de l’espace est quant à elle consacrée aux jeunes avec une animation organisée par l’Euro Space Center. Un télescope solaire est également accessible au grand public sur le rooftop du pavillon.
Les pieds sur Terre et les yeux vers les étoiles
Le Professeur Sarah Baatout est directrice de l'unité de radiobiologie au SCK CEN (Centre de recherche nucléaire belge) à Mol, où elle dirige des recherches dans les domaines de la radiobiologie, de la radioprotection, de la biologie spatiale et de la médecine spatiale. Elle enseigne également en tant que professeur invité à l'Université de Gand et à l'UCLouvain. Elle étudie actuellement l'impact des rayonnements cosmiques sur les astronautes européens et les cosmonautes russes afin de mieux comprendre comment la physiologie humaine est affectée par les rayonnements spatiaux et comment mieux préparer et protéger les astronautes pour des missions plus longues vers la Lune ou pour assurer le succès de l'exploration humaine et protéger la santé des astronautes. Elle s'est rendue à la station belge Princesse Elisabeth, en Antarctique, pour étudier l'évolution de la santé dans cet environnement extrême où le degré d'isolement et de confinement est élevé et le mieux adapté aux missions humaines de longue durée dans l'espace. Sarah Baatout est également représentante belge à l'UNSCEAR (Comité scientifique des Nations Unies sur les effets des rayonnements atomiques), membre du Conseil supérieur de la santé et a reçu de l'Académie royale des sciences et des arts de Belgique le prestigieux Prix Wetrems de la meilleure découverte dans le domaine des sciences naturelles. Récemment, elle a reçu le prix de la « Personnalité BeSpace de l'année », une reconnaissance pour ses travaux de recherche et de sensibilisation dans le secteur spatial.
Le Dr Vladimir Pletser, quant à lui, est directeur des opérations d'entraînement spatial chez Blue Abyss, et propose une nouvelle approche pour la formation des astronautes. Auparavant, il a passé deux ans à Pékin comme professeur invité et conseiller scientifique au Centre d'Utilisation spatiale de l'Académie chinoise des sciences, pour la recherche en microgravité en vols paraboliques et sur la station spatiale chinoise. Il a été pendant 30 ans ingénieur-physicien principal au Centre européen de recherche et de technologies spatiales de l'ESA, où il a développé des instruments pour la recherche en microgravité sur la Station spatiale internationale et coordonné les campagnes de vols paraboliques. Il a effectué plus de 7.350 paraboles, équivalent à 39h30 d'apesanteur ou 26 orbites terrestres. Candidat astronaute belge, il a suivi l'entraînement comme spécialiste de charge utile à la NASA et a participé à trois simulations de mission sur Mars. En tant que professeur invité dans une vingtaine d'universités à travers le monde, il enseigne dans le domaine des sciences spatiales et de la recherche en microgravité.
De l’importance d’être à Dubaï
Vladimir Pletser : "J'ai été invité à participer à la Semaine Wallonie-Bruxelles au Pavillon belge et à présenter avec ma collègue, le Pr Sarah Baatout, la recherche spatiale en Fédération Wallonie-Bruxelles. Nous avons en Belgique, et plus particulièrement à Bruxelles et en Wallonie, des chercheurs et des scientifiques reconnus internationalement comme étant parmi les meilleurs au monde dans leurs domaines, et il est important de le faire savoir au public international. La recherche spatiale en Fédération Wallonie-Bruxelles est extrêmement active à tous points de vue et il faut le dire."
Sarah Baatout : "WBI et l’AWEX m’ont invitée à participer à l’Exposition universelle de Dubaï et à y présenter ma recherche de pointe dans le domaine spatial effectuée en collaboration avec différentes universités, centres de recherche et industriels wallons mais également belges et européens. Je suis particulièrement honorée de présenter certains aspects de notre recherche spatiale belge francophone et de notamment mettre en évidence quelques fleurons wallons et bruxellois."
Selon les deux chercheurs, une telle masterclass a toute son importance. Ainsi, ils expliquent : "Nous avons choisi de présenter quelques pans de la recherche spatiale en Fédération Wallonie-Bruxelles. Il est en effet impossible d'aborder en 2h tout le secteur spatial en Wallonie et à Bruxelles. Il est beaucoup trop riche et abondant et il faudrait plusieurs jours pour présenter tous les acteurs de la recherche spatiale en Fédération Wallonie-Bruxelles. Nous avons donc choisi un fil conducteur porteur et d'actualité, la préparation des futures missions habitées vers Mars. Six chapitres scientifiques sont abordés, montrant la diversité de la recherche spatiale, entrecoupés de capsules artistiques soulignant l'attrait qu'exerce aussi l'espace sur les artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles."
Les deux scientifiques portent un regard empli de fierté sur le secteur aérospatial en Wallonie et à Bruxelles. Selon V. Pletser : "C'est un secteur très dynamique et en expansion continue. Les résultats scientifiques engrangés ces dernières années placent nos chercheurs parmi les meilleurs au monde. Le savoir-faire technique des ingénieurs et des jeunes startups en Fédération Wallonie-Bruxelles est recherché par les grandes sociétés d'aérospatial, qui elles-mêmes sont impliquées dans la plupart des grands contrats industriels de développement technologique en support des projets spatiaux internationaux, actuels et futurs, comme le retour vers la Lune et l'exploration de Mars. Il faut en retenir que l'espace appartient à tout le monde. La recherche spatiale touche un vaste public, non seulement les scientifiques et les ingénieurs, mais également les artistes et le grand public."
S. Baatout, quant à elle, pense que "L'industrie wallonne et bruxelloise joue un rôle de premier plan dans le secteur aérospatial. De nombreux avions et engins spatiaux portent la marque du savoir-faire de Wallonie-Bruxelles. Dans le domaine des sciences spatiales du vivant et de la médecine spatiale, la Belgique francophone est également très active. Elle dispose d'un large éventail d'infrastructures, dont plusieurs aéroports internationaux, la station de suivi des satellites de l'Agence spatiale européenne (ESA) à Redu et le centre de télécommunications spatiales à Lessive."
Le futur de l’humanité
Selon V. Pletser, "L'espace est le futur de l'humanité. Comme disait le savant russe Tsiolkovski, la Terre est le berceau de l'humanité, mais personne ne reste jamais longtemps au berceau. Il est tout à fait normal que l'être humain cherche d'abord à étudier et à comprendre l'environnement circumterrestre et l'espace plus lointain, et dans un deuxième temps, à explorer ce nouvel environnement. D'autre part, étudier les autres planètes, comme Mars, nous permet de mieux comprendre notre propre planète, la Terre. L'observer depuis une position orbitale nous renseigne également sur son évolution climatique et météorologique. Et finalement la recherche à bord des stations spatiales en orbite nous apporte de nouvelles connaissances, avec des retombées directes pour le bien-être de l'humanité sur Terre comme par exemple une meilleure compréhension du système cardio-vasculaire et de ses troubles, ou comme l'ostéoporose."
La médecine spatiale pour aider sur Terre
Comme l’explique S. Baatout, "La médecine spatiale s’intéresse à la santé des astronautes dans l’espace. Lors de missions spatiales, le corps change avec l'impesanteur, et réagit différemment. L’enjeu actuel est d’assurer la bonne santé des astronautes au cours de voyages spatiaux qui promettent d’être plus longs. Les spécialistes estiment qu’en six mois, le corps accuse un vieillissement d’environ dix ans. Les muscles s’atrophient, les os deviennent poreux, la vue baisse. Des exercices cognitifs aux nouveaux médicaments en passant par des exercices de gymnastique spécialisés, des systèmes de diagnostics performants, des traitements innovants contre le cancer et la télémédecine : la recherche médicale dans l’espace couvre un large spectre. Les expériences menées sur les astronautes permettent d’en apprendre plus sur la physiologie humaine. Quand des innovations en découlent, les chercheurs n’hésitent pas à les transposer pour le commun des Terriens. Dès lors, la recherche spatiale contribue à l’amélioration du diagnostic et des traitements sur Terre."
Et la jeunesse ?
"Tous les domaines de la recherche spatiale sont en pleine expansion, explique Vladimir Pletser. Il y a donc toujours un besoin constant de jeunes talents pour participer à cet élan de recherche et d'exploration de l'espace. Toutes les professions sont de plus en plus nécessaires pour supporter l'exploration planétaire et de l'espace lointain. Le meilleur conseil qu'on puisse donner à un jeune est d'être, et de rester, passionné et de ne jamais arrêter de croire en ses rêves. La passion pour l'espace est sans fin et remplit constamment et pleinement la tête et le cœur de ceux qui sont passionnés. Il faut continuer de transmettre cette passion aux jeunes et d'expliquer au grand public combien il est important d'investir dans cette démarche."
"L'exploration spatiale alimente la curiosité et l'imagination de nos enfants, explique de son côté Sarah Baatout. Des modèles tels que les astronautes et les scientifiques incitent les jeunes à rêver et, par conséquent, à atteindre leurs objectifs. De nombreux astronautes, ingénieurs, scientifiques et innovateurs se souviennent avoir regardé l'alunissage dans leur enfance et avoir été motivés pour réaliser leurs rêves. Les prochaines étapes nécessaires pour l'humanité seront d'explorer davantage la Lune et Mars, et de repousser les limites de ce qui est considéré comme possible, jetant ainsi les bases pour que les générations futures s'aventurent encore plus loin de notre planète. Tous les jeunes peuvent participer à cette entreprise scientifique, technologique et humaine et jouer un rôle important dans ces prochaines étapes, repousser les limites et poser les fondations pour les générations futures."
La Semaine Wallonie-Bruxelles à l’Expo Dubaï 2020 a lieu du 6 au 12 novembre 2021. Retrouvez le programme complet ici.